Dans exactement 33 semaines, s’ouvriront les Jeux de Paris 2024 et l’entrée en lice des équipes de France championnes olympiques en titre. Avec les 50 nuances de Jeux, nous désirons vous faire revivre, chaque semaine, les épopées de l’équipe de France au travers de huit olympiades, de Barcelone 92 avec la première médaille décrochée par les Bronzés de Daniel Costantini, jusqu’à Tokyo où les deux collectifs se sont parés d’or. Des histoires singulières, des anecdotes, des portraits, des coups d’arrêts aussi où pendant trois éditions (1996, 2000 et 2004), le handball français rongeait son frein pour mieux briller à Pékin et à Tokyo, en passant par Londres et Rio. Vingtième épisode avec « Un pin’s pour la Reine ».

BARCELONE 1992 – HOMMES

Un pin’s pour la Reine

Elle est partout chez elle, sur la colline de Montjuic comme dans le vieux quartier dégradé de Poblenou et bien sûr au Port Olímpic où son fils, le prince Felipe, a pris la sixième place en Soling, l’une des classes de la compétition de voile. Sophie de Grèce, reine d’Espagne, raffole du sport et des JO. Elle a participé à ceux de Rome, en 1960, comme suppléante, dans l’équipe de voile elle-aussi. Ce 25 juillet 1992, elle assiste à la cérémonie d’ouverture des Jeux de la XXVe olympiade de l’ère moderne dans le stade olympique, aux côtés de son époux, le roi Juan Carlos 1er, et du Catalan Juan Antonio Samaranch, président du CIO. Elle adresse un salut exalté à Felipe, porte-drapeau de la délégation espagnole, à Fermín Cacho, aussi, l’un des treize futurs médaillés d’or espagnols. Le lendemain, contre toute attente, en ouverture du tournoi de handball, les Bleus dominent l’Espagne (18-16), un résultat qui les lancent sur la route des demi-finales et fait office de faire-part de naissance du courant barjot. 

Les plus éminents des représentants sont évidemment à Barcelone cet été-là. Dont Philippe Gardent. Chacun se souvient ses cheveux blonds, son tir dos au but, ses éclats et ses élans. Mais peu de monde sait son amour pour la royauté. « Non, ça n’a rien à voir, sourit-il, c’était juste un geste spontané, sans doute impulsif. »

Le geste ? La scène se déroule dans la cantine du village olympique. A l’heure du déjeuner, les Bleus sont à table. Sa Majesté la Reine d’Espagne partage la pitance avec sa délégation. Elle vit ces Jeux avec toute sa passion, toute sa bienveillance. Elle ignore alors, bien sûr, qu’Iñaki Urdangarin Liebaert, l’arrière droit de la sélection ibérique, assis là-bas, à quelques mètres, épousera cinq ans plus tard sa fille, l’infante Cristina de Borbón, et deviendra Duc consort de Palma de Majorque. « La Reine est passée près de notre table, raconte Philippe Gardentet je me suis levé afin de l’accoster pour lui offrir un pin’s de la Fédération française. Je ne sais absolument pas ce qui m’a pris, ni pourquoi j’avais ce pin’s de la FFHB dans ma poche d’ailleurs. »

Sauf qu’au village, la Reine Sophie n’a pas de dames d’honneur mais des gardes du corps. « Ils m’ont attrapé sans ménagement, poursuit Gardent, et m’ont très vite fait comprendre que ça n’entrait pas dans le protocole. Mais la Reine a deviné qu’il n’y avait aucun calcul de ma part, que c’était une simple petite et gentille attention. Finalement, elle a été adorable. Elle m’a parlé en Français, elle m’a remercié, et elle a pris le pin’s ! » L’histoire ne dit pas si elle l’arborait lors de la cérémonie de clôture…