Héroïques, les Bleues ont écrit mercredi l?une des plus belles pages de leur histoire en sortant du Mondial les Russes triples tenantes du titre.


Héroïques, les Bleues ont écrit mercredi l?une des plus belles pages de leur histoire en sortant du Mondial les Russes triples tenantes du titre.

Le troisième millénaire a débuté voilà bientôt douze ans. Une éternité en handball. Pourtant, en douze années, aucune nation n?a réussi à éliminer la Russie d?un championnat du monde. Aucune, sauf la France? Les Bleues l?avaient fait en 2003, dans un dernier match de poule à la vie, à la mort, équivalent à un quart de finale. Elles étaient alors allées jusqu?au bout de l?aventure en devenant championnes du monde, un titre que les Russes ont monopolisé à chaque autre occasion (2001, 2005, 2007, 2009). On se doutait que, dans ce Mondial brésilien, une seule équipe pourrait battre la surpuissante Russie, grande favorite de la compétition. Cette équipe, qui était également la seule que les filles de Trefilov craignaient vraiment, c?était évidemment la France.

Restait à voir, sur le terrain, si l?hypothèse pouvait devenir réalité. On a vu. On n?en a pas loupé une miette. Les Françaises ont réussi l?improbable. Pendant soixante minutes, elles sont parvenues à enrayer la si redoutable machine à marquer des Slaves. Elles ont régné en maîtres dans leur neuf mètres. La défense française a dominé l?attaque russe de bout en bout. Sans jamais varier de système, alors que les changements tactiques sont pourtant une spécialité bien gauloise? Hier, la fameuse défense en 0-6 qu?Olivier Krumbholz souhaitait imposer à ses adversaires ces derniers mois s?est révélée impénétrable. « On entend parfois dire que la 0-6 n?est pas une défense à la française, et que pour que la France gagne, il faut qu?elle joue en 1-5, comme dans le dernier quart d?heure contre la Suède. On a eu la réponse aujourd?hui? En fait, il faut faire les bonnes stratégies défensives au bon moment », apprécie l?entraîneur français.
 


« Ressentir cela, ça transcende »

Cette fameuse défense en 0-6 avait pourtant montré des signes de faiblesse depuis le début de ce Mondial, contre le Brésil au premier tour, et contre la Suède en huitième de finale. « Sur ce match, on a retrouvé notre bloc central à quatre, avec beaucoup d?entraide, des montées incessantes et surtout dans le bon timing », se réjouit Raphaëlle Tervel. Oliver Krumbholz confirme : « Contre le Brésil, les défenseuses montaient trop haut, elles se retrouvaient isolées les unes des autres. Là, les filles ont été très équilibrées, plus en bloc, ni trop haut, ni trop bas, et en plus elles ont très bien bloqué les pivots. Il n?y a vraiment rien à redire sur la défense, elle a été énorme. On pourra toujours dire que la Russie a mal joué, et c?est vrai qu?elles n?ont pas bien joué, mais pourquoi ? Parce qu?on les a faites déjouer? » 

Pour Raphaëlle Tervel, la clé de la réussite défensive face à l?armada russe tient en deux points : « D?abord notre état d?esprit, et puis le style de jeu des Russes. Elles jouent beaucoup au centre, ne prennent pas beaucoup les intervalles extérieurs. Cela nous a permis d?être plus proches les unes des autres, on arrivait presque à pouvoir gêner deux filles en même temps. » Les Russes n?ont jamais réellement trouvé la solution. Plus le match avançait, et plus le sentiment d?inconfort se lisait sur leur visage. « Sur la fin de match, j?avais l?impression que Postnova était la seule qui n?avait pas encore la tête sous l?eau, témoigne Camille Ayglon. Les autres, je sentais qu?elles ne savaient plus où donner de la tête. Ressentir cela en défense, ça transcende, ça donne un moteur pour tous les autres secteurs de jeu. » 

Et en effet, la montée de balle et l?attaque tricolores n?ont pas été en reste, avec notamment une Allison Pineau et une Alexandra Lacrabère une nouvelle fois exceptionnelles. « Je crois que c?est la première fois que je vois Trefilov, l?entraîneur russe, péter les plombs ainsi. D?habitude il ne s?en prend qu?à ses joueuses. Mais là il s?en est pris aux arbitres, à la table, à tout le monde? Il a bien senti que c?était difficile pour eux. » L?anecdote de Raphaëlle Tervel en dit long sur l?impuissance des Russes. Les triples championnes du monde en titre sont maintenant tombées. Et voilà les Françaises lancées vers une demi-finale piège face au Danemark, qu?elles aborderont comme favorites.