Entraîneur des Bleues depuis 1998, Olivier Krumbholz est, parmi les sélectionneurs français en activité tous sports collectifs confondus, celui qui compte le plus d?ancienneté. Une longévité exceptionnelle !


Entraîneur des Bleues depuis 1998, Olivier Krumbholz est, parmi les sélectionneurs français en activité tous sports collectifs confondus, celui qui compte le plus d?ancienneté. Une longévité exceptionnelle qui n?empêche pas l?ambition : l?équipe de France disputera une quatrième finale mondiale si elle bat le Danemark, ce soir à Sao Paulo.

Dans moins d?un mois, Olivier Krumbholz bouclera son deuxième septennat à la tête de l?équipe de France féminine de handball. Ils sont peu, dans l?histoire du sport français, à pouvoir ainsi aligner sur leur CV quatorze années à la tête d?une sélection. Le Lorrain était déjà en poste lorsque l?équipe de France a glané ses premiers lauriers, en décembre 1999. Toutes les joueuses actuelles, jusqu?à la plus expérimentée, Raphaëlle Tervel, n?ont connu que lui comme entraîneur national. « La longévité d?Olivier, c?est une histoire de vins. Un bon vin est meilleur après dix ans d?âge. La fédération française de handball est une grande cave où on essaie de ne pas boire du Beaujolais tous les jours. Daniel Costantini est resté seize ans, Olivier en est à treize, et Claude Onesta à dix. Le poste de sélectionneur est un métier en soi. Il nécessite du temps pour réussir, c?est un investissement », justifie le DTN du handball français, Philippe Bana.

« J?essaie plus de m?adapter que de me bonifier avec le temps », rectifie dans un sourire l?intéressé, en réponse à la métaphore viticole de son DTN. « J?essaie de gommer certaines aspérités de mon personnage, même si les aspérités font partie de moi. J?essaie d?aller davantage à l?essentiel, sans me perdre dans l?accessoire. Mais je reste convaincu que le détail est primordial. Personne ne réussit dans l?à peu près. La rigueur, la minutie, la précision restent encore aujourd?hui mes principaux leitmotivs. » C?est précisément cette ligne directrice qui, à entendre Philippe Bana, est pour beaucoup dans le maintien en poste du Lorrain : « La rigueur et l?exigence, c?est ce dont le handball féminin avait besoin pour se structurer. Olivier n?a jamais changé de ligne. Il n?est jamais devenu mou, il est toujours resté lui-même. On lui a toujours gardé notre confiance, même dans les moments de tension post-olympiques. »

« Encore de belles choses à vivre »
Olivier Krumbholz a beau avoir traversé les générations, son parcours n?a pas pour autant été de tout repos : « Les gens sont toujours dans l?instantané, ils font des photographies permanentes mais ne voient pas le film. Mon film avec l?équipe de France, c?est un mélange de cinéma d?aventure, de passion, d?amour et de haine, de drame psychologique avec des rebondissements. » Quand il prend les commandes de l?équipe de France, début janvier 1998, Krumbholz sait qu?il s?installe dans la durée, sans toutefois imaginer qu?il serait encore en poste quatorze ans plus tard : « A ce moment-là, j?étais plus préoccupé par le fait de faire monter cette équipe, j?avais tellement d?ambition? Je me demandais comment j?allais faire et combien de temps ça prendrait pour obtenir des résultats. Avec les dirigeants, on pensait qu?il faudrait six ou sept ans, l?objectif était d?être aux Jeux Olympiques d?Athènes en 2004. Les résultats sont arrivés bien plus vite que prévus. »

Le technicien français s?est ainsi forgé un palmarès très enviable : trois participations aux Jeux Olympiques sur trois possibles, champion du monde en 2003, vice-champion du monde en 1999 et 2009, et double médaillé de bronze européen en 2002 et 2006. Plusieurs fois contacté à l?étranger, il aurait pu quitter le navire en cours de route : « J?ai été tenté de partir à l?étranger dans les années 2000, avec mes enfants quand ils étaient plus jeunes. Je n?ai pas franchi le cap pour des raisons personnelles, et puis parce qu?une maîtrise parfaite de la langue est à mon avis indispensable dans ce travail. Le charisme d?un entraîneur passe inévitablement par les mots, par l?échange. Mon métier n?est pas de baragouiner trois conneries dans un mauvais anglais comme le mien. Mais de toute façon, à l?étranger aussi les gens voient bien que je suis installé dans quelque chose de stable avec l?équipe de France. » De tellement stable qu?il se voit bien continuer l?aventure jusqu?aux Jeux de Rio en 2016 : « J?aimerais encore faire l?olympiade à venir. Il y a de belles choses à vivre et je n?ai pas le sentiment d?avoir fini mon travail, d?avoir apporté tout ce que je pouvais en termes de structuration. »

Le handball féminin a beaucoup changé depuis 1998, surtout dans la professionnalisation. Si Olivier Krumbholz admet s?être adapté durant toutes ces années, notamment en se concentrant de plus en plus sur le jeu et de moins en moins sur la vie du groupe, le profil de ses joueuses a évolué beaucoup plus que lui. « Elles ont aujourd?hui une approche plus investie de leur sport, elles sont plus professionnelles jusque dans leur hygiène de vie. Elles gagnent leur vie avec le handball, et elles sont toutes convaincues qu?elles ont raison d?être pros, alors qu?avant on avait des filles qui se demandaient jusqu?à quel point elles devaient se consacrer au handball. Mais c?est logique, et ça découle directement des résultats obtenus par les anciennes, qui leur ont ouvert la voie. Je ne pense pas qu?on aurait aujourd?hui une ligue de dix clubs professionnels si l?on n?avait pas été champions du monde en 2003. Par contre, on entend souvent dire que la jeunesse a changé mais pas dans le bon sens. Je ne suis pas d?accord avec ça. Je me sens davantage reconnu, plus respecté et moins contesté dans ma compétence par mes joueuses actuelles que par certaines anciennes. »

Après l?immense exploit réussi face aux Russes en quart de finale, l?équipe de France a rendez-vous avec l?Histoire, ce soir face au Danemark, quatrième finale mondiale à la clé. Un grand vin prend toujours plus de valeur quand on lui décerne des médailles?