Allison Pineau et Mariama Signaté seront toutes les deux dans les tribunes lors de la finale du Mondial contre la Norvège. Un crève-c?ur mais les deux arrières tricolores sont bien décidées à aider leurs copines pas d?autres moyens. Confidences partagées.


Allison Pineau et Mariama Signaté seront toutes les deux dans les tribunes, ce soir lors de la finale du Mondial contre la Norvège. Un crève-c?ur pour celles qui ont tant fait pour que l?équipe de France en arrive là. Blessées physiquement, les deux arrières tricolores sont bien décidées à aider leurs copines pas d?autres moyens. Confidences partagées.

« D?abord Allison, comment avez-vous vécu la terrible soirée d?hier, avec votre grave blessure dès la deuxième minute de jeu contre les Danoises en demi-finale ?
Allison Pineau : Mal? J?ai eu un moment de flottement en partant de la salle, dans l?ambulance et en passant les examens à l?hôpital. Je me rappelle très bien de l?action, et puis j?ai revu les images. J?ai sauté assez haut, Melgaard m?a déséquilibrée en l?air et je suis retombée sur ma jambe tendue, le genou est parti sur le côté? J?ai compris tout de suite que c?était grave, dès que je suis retombée au sol. Ensuite, au bord du terrain, je me suis dit inconsciemment que je pouvais rejouer, que je n?avais mal que dans ma tête. Mais quand le corps ne peut plus? J?étais écoeurée sur le moment, au bord du dégoût en quittant la salle. C?est arrivé au plus mauvais moment, en demi-finale du Mondial et en début de match.

Et vous Mariama, comment avez-vous vécu l?instant ?
Mariama Signaté : J?étais en tribune de presse, en train de commenter le match en direct sur RMC. J?étais sous le choc, j?ai eu du mal à enchaîner. Je l?ai vue pleurer, et je sais que ce n?est pas son genre? En plus moi je suis du genre à me voiler la face, quand on me dit que j?ai une fracture j?ai tendance à me dire que c?est surement une fracture pas importante. Alors j?ai eu une lueur d?espoir quand je l?ai vue se relever.
Allison Pineau : Ouais, c?était une belle feinte?

Dans un contexte aussi particulier, comment avez-vous accueilli la qualification pour la finale ?
Allison Pineau : J?étais à l?hôpital avec Franck Lagniaux, le kiné. On a suivi le match avec les textos d?Edina Borsos, la manager. Quand elle a écrit que le score était de 27-23 et qu?il restait une minute, on a sauté de joie avec Franck, on s?est serré dans les bras. Sur le moment c?était l?explosion, je me suis dit ça y est, on est là où on voulait être. Et puis tout de suite après, tu te rappelles que toi tu n?y seras pas?
Mariama Signaté : Pareil pour moi, l?explosion de joie au début, et puis un goût amer à cause d?Allison, et à titre personnel aussi. Depuis l?entraînement dimanche (et ma lésion à la pommette gauche), je vis chaque qualification en me disant aussi que je ne serai pas là le match suivant. C?est quand même douloureux de se dire qu?on ne pourra pas aider l?équipe comme on le souhaitait, surtout que j?ai souvent l?habitude de monter en puissance en deuxième semaine et que c?est peut-être la dernière fois qu?on vit de tels moments avec ce groupe. Dimanche, j?ai pleuré trois heures d?affilée, mais depuis j?ai arrêté. Il faut penser au collectif. On est dans une guerre et quand une fille tombe, le combat continue.

« Ca ne sert à rien de se morfondre »
Que pensez-vous pouvoir apporter au groupe d?ici la finale de demain ?
Mariama Signaté : De l?énergie positive, des encouragements quand les filles en ont besoin, des conseils lors de la préparation du match? On reste un groupe, même si c?est dur pour nous deux, surtout pour Allison parce que c?est tout frais. Moi ça fait une semaine et je suis encore triste, mais on va les encourager et les motiver.
Allison Pineau : On va leur donner de l?énergie positive. Ca va les aider de voir des sourires sur nos visages.

Mais ce n?est pas facile de sourire quand on n?en a pas vraiment envie?
Allison Pineau : Oui, mais il faut dédramatiser. De toute façon ça ne sert à rien de se morfondre. Ca ne me fera pas avancer de pleurer éternellement. Plus je positive, et plus j?avancerai. Et puis chacune des filles va penser à nous. Nous aussi, nous sommes là pour elles.

Justement, toutes les joueuses ont souligné juste après le match qu?elles avaient gagné pour vous. Comment réagissez-vous ?
Mariama Signaté : Ca fait plaisir, et ça donne envie de revenir vite pour leur rendre tout ça. Cela montre qu?on est un vrai groupe. Chacun donne le maximum au moment où elle peut le faire. J?espère qu?on sera toutes les deux aux Jeux Olympiques, et là on aura la rage?
Allison Pineau : C?est touchant, je l?ai pris avec beaucoup d?affection. Elles se sont transcendées, ça donne du courage pour revenir et leur rendre l?appareil.

Les Jeux Olympiques, vous y croyez Allison ?
Allison Pineau : Oui, j?y crois. Quand on m?a annoncé à l?hôpital la rupture du ligament croisé antérieur, je me suis effondrée. Les Jeux, je n?y croyais plus. Déjà qu?à Pékin j?y étais allée comme remplaçante, sans jouer? Mais le docteur Gérard Juin m?a dit que je me trompais si je pensais que c?était terminé pour les JO. Mon ménisque n?est pas touché, le cartilage non plus, il n?y a que le ligament qui est rompu, donc six mois peuvent suffire (les Jeux débutent dans un peu plus de sept mois, fin juillet 2012). J?attends l?opération, et ensuite je vais me battre. A partir de maintenant, c?est dans la tête que ça se joue. Le timing est serré, il risque d?y avoir de nouveaux obstacles en cours de route, mais j?y crois.

Qu?avez-vous envie de dire aux filles à quelques heures de la finale face à la Norvège ?
Mariama Signaté : Déjà un grand merci pour toute l?énergie déployée. Dès qu?on a perdu quelqu?un, Armelle, Allison ou moi, elles ont été survoltées. La tristesse s?est transformée en rage, ça nous a rendu plus fort.
Allison Pineau : Moi je voudrais leur dire de se battre pour elles. C?est bien de le faire pour nous, mais il faut aussi qu?elles pensent à elles. Dans la difficulté on a toujours réussi à relever la tête. Malgré les circonstances, tout le monde fera en sorte que ça passe.
Mariama Signaté : Peu importe la composition d?équipe, le groupe reste le même?
Allison Pineau : Et on n?est pas des Femmes de défis pour rien ! Alors pourquoi on ne gagnerait pas cette finale ? »