Elle avait mis sa carrière entre parenthèses pour avoir un enfant. Nina Kanto l?avait dit, elle reviendrait. Six mois après la naissance de son fils Noa, elle porte à nouveau la tunique messine avant de retrouver celle de l?équipe de France dans quelques jours. Un retour tambour battant qui n?a surpris personne. Sauf elle?


Elle parle doucement. Chuchote presque. De retour de l?entraînement, Nina Kanto se glisse sans bruit dans la chambre de son fils. Ferme la porte puis change de pièce. Sa voix rayonne quand elle répond à la première question. « Tout ce temps sans handball, j?ai adoré ! (rires). Sérieusement, j?ai pu profiter de ma famille, de mon couple, de mon fils? Parfois, jouer, ça manque, mais je savais que j?allais revenir. Alors je n?étais pas impatiente. Aujourd?hui, chaque matin, je suis heureuse ».

La vie a donc beaucoup changé pour l?enfant de Yaoundé. Désormais rythmée par les biberons, les entraînements, les réveils dans la nuit? Mais la demoiselle n?a pas perdu son incommensurable volonté. Elle savait qu?il faudrait se battre pour être, de nouveau, à la hauteur du haut niveau. « C?était un défi un peu fou. Un défi contre moi-même. Heureusement, j?ai eu la chance d?être entraînée et suivie par un préparateur physique, Arthur Yapo, qui m?a proposée un programme adapté. Je veux d?ailleurs le remercier. Sans lui, les choses seraient sans aucun doute différentes aujourd?hui ».

Parce qu?aujourd?hui, un peu plus de deux mois après le début de la préparation en club, Nina Kanto fait déjà des étincelles sous le maillot messin. Le coach lorrain, Sébastien Gardillou, ne mâche d?ailleurs pas ses mots pour souligner l?investissement sans faille et son immense détermination. « Elle est irréprochable. Notamment au niveau de sa préparation physique. Elle a tout digéré. Quand on sait qu?en avril, elle avait encore quelques kilos en trop, elle partait de loin. Elle a accepté le travail. Elle a parfaitement réussi à concilier sa vie de mère et le handball, elle est en passe de réussir son pari. »

« Je ne m?y attendais pas »
L?intéressée, elle, confesse qu?elle a pourtant ressenti un peu d?appréhension à l?aube de son retour. « Je me suis posée des questions? Est-ce que j?allais encore aimer ça, déjà ? Est-ce que j?allais encore ressentir de belles sensations ? Sachant qu?aujourd?hui, mon premier métier, ça n?est plus joueuse de handball, c?est celui de maman ». Vraisemblablement, les sensations sont-là. Auteur d?une bonne préparation, Kanto a démarré la saison sur les chapeaux de roue. Mais elle ne veut pas « s?enflammer ». La tête brûlée a laissé place à une femme mesurée. Malgré tout, elle a gardé son tempérament de feu. Cette fureur de vivre, cette envie farouche d?atteindre ses objectifs. «Je suis une battante et je marche beaucoup au mental, c?est vrai. Mais on ne décide pas de laisser son fils à la maison si ce n?est pour s?investir à fond. » « Nina, quand elle fait quelque chose, elle le fait bien, un point c?est tout », ponctue Gardillou.

Si bien même qu?Olivier Krumbholz a choisi de la sélectionner pour le premier tournoi de préparation de la saison avec l?équipe de France. « Je ne m?y attendais pas du tout, souffle Kanto. Je ne m?y étais pas préparée ! Pas si tôt en tout cas ». Et pourtant, elle sera bien de la fête au Danemark pour une semaine. « J?ai un peu peur du sentiment de culpabilité? C?est la première fois depuis la naissance de mon fils que je vais le laisser une semaine entière. Mais je sais aussi que je ne vais me séparer de ma famille tout ce temps pour ne rien faire de bien. J?y vais pour bosser. Et ce sera aussi un test émotionnel. Je saurai si je suis prête ou pas. » Malgré l?appréhension, Nina Kanto sourit à l?idée de retrouver ses copines. « Je vais retrouver Siraba (Dembélé) et Linda (Pradel). Et puis, l?équipe de France c?est l?équipe de France ! Je suis bleu-blanc-rouge ! Ca reste une des plus belles sources de motivation. »

Dans un dernier sourire, Nina Kanto raccroche le téléphone et file rejoindre Morphée. Elle n?en est peut-être pas encore persuadée. Mais une chose est certaine, elle a tenu son pari. Et c?est pour le bon plaisir de tous que son énergie va illuminer, à nouveau, les parquets d?ici et d?ailleurs.