Ancienne ministre des Sports de 1997 à 2002, députée de la 4e circonscription de Seine-Saint-Denis, Marie-George Buffet se bat toujours avec force et conviction sur les sujets de société. À la veille de la journée internationale des droits des femmes, elle évoque son combat pour la présence d’une délégation féminine afghane aux J.O. de Paris 2024, au relai d’une pétition en ligne ici.

En quoi la politique des Talibans qui consiste à interdire toute activité sportive aux femmes est-elle symbolique ?
Car c’est tout un symbole que l’une des premières décisions des Talibans ait été d’interdire la pratique sportive aux femmes. Cela donne à voir la place du sport dans l’épanouissement de chaque individu, femmes et hommes, dans son rapport au corps, dans sa pratique sportive, dans son rapport aux autres. Que les Talibans aient comme symbole le renfermement des femmes, cela appelle à une mobilisation pour au contraire réaffirmer que le sport est un droit pour tous et pour toutes les femmes, un droit auxquelles les femmes doivent accéder de par le monde.

Quel rôle peut jouer le Comité International Olympique pour faire infléchir les décisions des Talibans ?
Ces derniers jours le CIO et différentes fédérations internationales ont, en réaction à la guerre faite par Poutine au peuple ukrainien, pris des décisions concernant le mouvement sportif. Si le CIO disait haut et fort que les pays qui n’acceptent pas la pratique sportive pour les femmes, qui ne respectent pas la charte olympique, ils ne sont pas en capacité de participer aux grandes compétitions sportives tels que les Jeux olympiques. Je pense que ce serait un moyen de pression extrêmement important envers ces États. Le CIO ne peut pas une fois faire pression et une autre fois fermer les yeux. Le CIO a des outils pour se faire entendre.

Le comité d’organisation des Jeux olympiques de Paris 2024 et plus largement l’État français ont-ils aussi un rôle important à jouer ?
Je le pense énormément. À chaque fois que je me suis adressée au président de la République et au ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, ils m’ont chacun répondu que bien sûr la question des femmes afghanes les préoccupait énormément. J’ai déposé, auprès du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, des dossiers de femmes afghanes menacées parce qu’elles sont sportives, notamment des footballeuses et des joueuses de l’équipe féminine de handball, avec les noms et les coordonnées nécessaires. Pour l’instant, la France n’arrive plus à faire sortir des réfugiés d’Afghanistan et là aussi il ne faut pas lâcher. Il faut que la France déclare que si cela n’évolue pas en Afghanistan d’ici aux Jeux olympiques de 2024, et bien elle ne souhaitera pas la présence d’une délégation afghane aux J.O.

Ne craignez-vous pas que demain la journée internationale des droits des femmes soit en partie éclipsée par l’actualité dramatique en Ukraine ?
L’actualité est bien sûr terrible avec la guerre en Ukraine mais les femmes restent mobilisées pour obtenir de nouveaux droits et de nouveaux acquis. Je pense que cette journée du 8 mars sera une journée forte. D’autres combats, telles que les violences faites aux femmes, sont à mener. En France, il y a aussi la question de l’égalité salariale avec encore aujourd’hui un écart de plus de 16 % entre les hommes et les femmes. Je débuterai la journée à la Maison du sport français (Cnosf) pour soutenir une initiative pour plus de mixité dans les instances. En fin de journée, à la Courneuve, je participerai à un échange, avec différentes championnes, sur la pratique féminine dans le sport. Ce mardi 8 mars sera bien une journée de mobilisation.

Propos recueillis par Hubert Guériau